9 Le nombre moyen de votes permettant d’obtenir un siège : tous les votes ne sont pas égaux

Ce texte fait partie de Élections québécoises 2022 et précédentes : S’indigner et remplacer le système électoral, une recherche de Mercédez Roberge, mise en ligne en octobre 2024. Téléchargez le document complet pour accéder plus facilement aux données des figures et des tableaux et consultez la table des matières.

L’iniquité de traitement des partis, et donc des opinions politiques, est visible lorsqu’on compare le nombre de votes dont chaque parti a besoin pour obtenir un siège. La formule consiste à diviser le nombre total de votes reçus par un parti par le nombre de sièges qu’il a globalement obtenus. Le chiffre obtenu équivaut au nombre moyen de votes par siège.

Que l’on compare les partis entre eux, ou les régions entre elles, le même constat se dégage : les votes ne sont pas égaux dans le système actuel et tout le soin pouvant être apporté au découpage de la carte électorale n’y changera rien tant que le SMU1T sera en place. En divisant le nombre total de votes recueillis par le nombre de sièges obtenus, on obtient le nombre moyen de votes requis pour obtenir un siège. Ce calcul fait voir que les votes n’ont pas le même poids selon le parti choisi et selon le lieu où ils sont déposés.

9.1 Des records nationaux pour le nombre moyen de votes permettant d’obtenir un siège

Les élections de 2022 se démarquent des autres en regard du nombre moyen de votes permettant d’obtenir un siège comme présenté par la figure 12. En effet, la CAQ a battu le record des 6 élections récentes en obtenant un siège avec aussi peu que 18 729 votes en moyenne, tandis que le PQ bat le record du nombre le plus élevé, puisqu’il a eu besoin en moyenne de 200 236 votes. Cela signifie qu’un vote pour le PQ a eu 11 fois moins de poids qu’un vote pour la CAQ, ce qui est pratiquement le double de l’écart record précédent, en 2018, alors que QS avait eu besoin de 6 fois plus de votes que le PLQ pour obtenir un siège.

9.2 Le poids des votes varie selon le parti choisi et la région où le bulletin est déposé

L’analyse, au niveau de chaque région, du nombre moyen de votes pour obtenir un siège illustre différemment les variations dans le poids de votes, selon le parti. Aux élections de 2022, dans les 8 régions représentées par plus qu’un parti le nombre minimum de votes pour obtenir un siège a été de 17 179 en moyenne, alors que la moyenne maximale était de 41 452 votes. Le tableau 15 concrétise cet écart. On y voit que le PQ a dû recueillir presque 5 fois plus de votes que le PLQ pour obtenir un siège à Montréal tandis qu’il avait besoin de presque 2 fois plus de votes que la CAQ dans les régions du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine. Le PLQ a quant à lui eu besoin de 2 et 3 fois plus de votes que la CAQ à Laval, Montérégie et Outaouais. Pour ce qui est de QS, il a eu besoin d’environ 2 fois plus de votes que la CAQ pour obtenir un siège dans les régions de la Capitale-Nationale et Estrie.

De tels écarts se produisent à toutes les élections. De 2007 à 2022, les populations de 15 régions ont vécu entre 1 et 6 élections où un parti a eu besoin d’au moins 2 fois plus de votes par siège que le parti obtenant le nombre moyen de votes le plus bas. Les écarts peuvent d’ailleurs être très élevés et toucher les populations de nombreuses régions. La figure 13 illustre la situation des régions où des partis ont eu besoin de beaucoup plus de votes qu’un autre pour obtenir un siège. Un écart de 8 fois a même été vécu en Montérégie en 2018, alors que le PQ a eu besoin de 152 209 votes pour obtenir un siège tandis que la CAQ en avait besoin de 8 fois moins pour ses sièges, soit 18 639 votes.

9.3 Nombre moyen de votes permettant d’obtenir un siège : Faits saillants des élections de 2022 et autres constats

  • La CAQ a battu le record des 6 élections les plus récentes en obtenant un siège avec aussi peu que 18 729 votes en moyenne, et le PQ a battu le record du nombre le plus élevé, soit 200 236 votes, un vote pour le PQ a donc eu 11 fois moins de poids qu’un vote pour la CAQ.
  • Dans 7 des 8 régions représentées par plus qu’un parti en 2022, la CAQ a eu besoin de moins de votes pour obtenir un siège que les autres partis, sauf la région de Montréal qui a été la seule à l’avantage du PLQ. Selon les régions, l’écart entre le nombre moyen le plus bas et le plus élevé pour obtenir un siège va de presque 2 à 5 fois. De 2007 à 2022, les populations de 15 régions ont vécu entre 1 et 6 élections où un parti a eu besoin d’au moins 2 fois plus de votes par siège que le parti obtenant le nombre moyen de votes le plus bas.
  • Il n’est pas normal d’accepter que le poids des votes varie selon le parti choisi ni selon lieu où le bulletin est déposé.
  • Un système proportionnel mixte compensatoire bien conçu mettrait fin aux iniquités dans le poids des votes, puisque chaque parti obtiendrait le nombre de sièges équivalent à ses appuis. Dans le contexte québécois, cela demande de corriger les distorsions à partir des résultats globaux et d’établir des régions électorales suffisamment grandes pour traiter tous les votes avec équité.

Compléments

14.1  Informations de base sur le fonctionnement du système majoritaire uninominal à 1 tour
14.2  Portraits des élections de 2022 pour chacune des régions
14.3  Mises en contexte historiques des résultats régionaux et nationaux des élections de 2022 selon les indicateurs de représentation
14.4  Analyse du projet de loi 499, déposé en octobre 2023, par Québec solidaire, en collaboration avec le Parti québécois

Liste des tableaux
Liste des figures
Lexique
Bibliographie