La proposition du comité du Parti libéral du Québec n’est pas une alternative au changement de système électoral

Lettre transmise aux médias le 4 octobre 2019.

Le 4 octobre, Martine Biron, de Radio-Canada a dévoilé le contenu d’un rapport d’un comité du Parti libéral du Québec relativement au changement de mode de scrutin. Présenté au caucus quelques jours avant le dépôt du projet de loi no 39 « Loi établissant un nouveau mode de scrutin », ce rapport annonce clairement que le PLQ s’opposera à toute remise en question le statu quo.

Bien qu’il prétende proposer une alternative au mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire, le système qui a la faveur du comité n’a rien de proportionnel, mais fait partie de la famille des systèmes majoritaires. Nommé « Vote alternatif » (ou vote préférentiel), ce type de mode de scrutin vise à élire une seule personne par circonscription, en classant en ordre de préférence les candidats et les candidates pour ce seul siège. Son fonctionnement équivaut à automatiser un système majoritaire à 2 tours sans avoir besoin d’une 2e journée de vote, mais aussi sans pouvoir réviser son vote à la lumière des résultats du 1er tour.

S’il en résulte des majorités plus fortes pour chaque personne élue, il ne permet pas pour autant le respect proportionnel des opinions politiques. Tout est orienté sur le besoin d’avoir une majorité forte et rien d’autre.

Le Vote alternatif reconduirait plusieurs défauts du mode actuel, dont le fait d’accorder aux votes un poids inégal selon l’endroit qu’on habite et le parti choisi. Il serait également tout aussi impuissant que le système que l’on connaît pour agir structurellement pour combler les déficits de représentation, des femmes, tout comme des personnes racisées ou nées à l’étranger.

En rejetant du revers de la main le mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire, le PLQ rejette un fonctionnement qui, s’il est mieux conçu que le projet de loi no 39, permet aussi de diversifier la classe politique. En effet, le comité du PLQ ne propose rien pour prendre en compte le fait que les chances de faire campagne, et de se faire élire, ne sont pas égales pour un homme blanc, vivant au Québec depuis plusieurs générations, dans un emploi stable et bien rémunéré versus la situation d’une femme dans un emploi précaire, ou d’une personne racisée sans réseau de soutien comparable.

La proposition du comité du PLQ n’est pas une alternative et ne mérite pas qu’on y accorde quelque crédibilité que ce soit. Le projet de loi no 39 souffre de nombreuses et importantes lacunes. Mettons nos énergies à les corriger et à forcer le gouvernement à mettre en place un vrai modèle proportionnel mixte compensatoire aux élections de 2022.

Mercédez Roberge, autrice de Des élections à réinventer, 2019, Montréal, Éditions Somme Toute

4 octobre 2019