25e anniversaire du Mouvement démocratie nouvelle

Allocution de Mercédez Roberge, le 8 mai 2024, à l’occasion du 25e anniversaire du Mouvement démocratie nouvelle

8 mai 2024, 25e anniversaire du Mouvement démocratie nouvelle. Assistance et prise de parole de Mercédez Roberge. Crédit photo: Martin Robert, FNEEQ-CSN.


C’est très émouvant de célébrer le 25e anniversaire du Mouvement démocratie nouvelle, quand on y a consacré beaucoup d’énergies.

Étant connue pour être pointilleuse, je me dois de souligner que la vraie date d’anniversaire du MDN c’est le 12 avril 1999. Mais passons ce détail.

Un 25e anniversaire c’est l’occasion de faire un bilan, ou à tout le moins de se donner la permission de redéfinir la route qu’on veut prendre. Mais ça commence par un effort de mémoire, ça demande d’apprécier ce qu’on a déjà fait.

Comme ex-présidente je vais donc vous rappeler quelques souvenirs. Je vous ramène donc dans la première moitié de la vie du MDN : 1999-2014. J’arrive pour ma part en 2002, en total apprentissage, comme bien d’autres. Notre formation vient de Paul-André Martineau, Lorraine Guay, Paul Cliche, Françoise David, Jean-Félix Chénier, Gaétan Châteauneuf (Conseil central du Montréal métropolitain CSN), Martine Blanc, Henry Milner, Diane Lamoureux, Gérard Talbot, Kristiane Gagnon et d’autres. Si vous remarquez bien, c’est une belle liste de féministes qui sont actives et cela a des effets sur le MDN.

Nous sommes formé.e.s au niveau technique, mais surtout guidé.e.s par des principes, des objectifs démocratiques qu’il nous semble si normal de réclamer. Formé.e.s pour revendiquer et pour retransmettre. Et c’est ce que nous ferons en organisant des débats transpartisans, des pétitions, des déclarations réunissant des personnalités de tous les partis.

D’élève je deviens enseignante. Et je ne suis pas la seule.

Dès ses débuts, le MDN demande et obtient 2 consultations, qui seront même simultanées : la Commission des institutions se donne un mandat d’initiative pour mener une consultation à l’Assemblée nationale, ce qui est une démarche rare, en plus des États généraux sur la réforme des institutions démocratiques.

Le MDN est alors aussi un point de ralliement pour les mouvements sociaux : toutes les organisations syndicales y mettent des énergies, leurs machines. Le mouvement féministe, mouvement communautaire aussi. C’est ce qui permet la large diffusion des outils, comme ce tabloïd de 8 pages en 2001 « Pour une réforme en profondeur de notre mode de scrutin – Pour que mon vote compte vraiment. Afin que l’Assemblée nationale reflète fidèlement la volonté populaire. Afin de renforcer la démocratie au Québec » en français et en anglais , des mémoires à la carte (français et anglais), une pétition, des présentations publiques, etc., et se transforme en des centaines de mémoires en 2002-2003 : 150 mémoires sont déposés à la Commission des institutions (Mémoire du MDN) et 237 mémoires aux États généraux sur la réforme des institutions démocratiques.

Et on recommence en 2004, face à un avant-projet de loi totalement insuffisant. Nous ferons d’autres outils et d’autres mémoires brefs, dont ce document « Afin que le nouveau mode de scrutin constitue une réelle avancée pour la démocratie » réalisé en 2005 avec le Collectif féminisme et démocratie. La Commission spéciale sur la loi électorale, une commission itinérante, recevra 369 mémoires (mémoire du MDN). C’était énorme et le fruit de la mobilisation du MDN.

Cette mobilisation a été construite par ses militantes et ses militants et par ses relations avec les mouvements sociaux. Ça vient avec une responsabilité : celle de garder vivantes les flammes qu’on allume, malgré les périodes d’attentes, les blocages, les reculs, les promesses politiques brisées.

La période actuelle me rappelle ce qu’on a vécu après le dépôt du rapport du Directeur général des élections du Québec (DGEQ) «Les modalités d’un mode de scrutin mixte compensatoire» en 2007. Il avait validé les consensus exprimés par les critiques de l’avant-projet de loi, mais en 2008 tout tombait au niveau politique. Sauf qu’on ne voulait surtout pas être en arrêt parce que le niveau politique n’avançait plus.

Le réalignement qui s’est imposé était de mettre l’accent sur la formation, on a donc fait ces 2 cahiers « Vers un nouveau mode de scrutin : s’informer et comprendre » (incluant son feuillet sur les différences entre les modes) et « Vers un nouveau mode de scrutin : se préparer et agir ensemble» (incluant son feuillet présentant une grille d’analyse), grâce au travail de Geneviève Dorais-Beauregard. On a donné beaucoup d’ateliers en 2008-2009. Ce cahier contenait les éléments à surveiller dans tout mode de scrutin.

On venait alors de tracer la voie vers la création, en 2010, d’un mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire accompagné de mesures fortes pour atteindre la parité et la diversité de la représentation. On y a mis tout ce qu’on voulait sous le nom « Solution démocratique », ici avec la contribution de Stéphane Lessard. En 2014 plus de 1000 personnes et organisations syndicales et communautaires l’avaient co-signé ou appuyé au niveau des principes. Ce modèle m’inspire toujours et pourrait servir encore,

Ce réalignement était essentiel durant cette période. Le MDN reprenait le contrôle de l’agenda.

On se trouve sans doute dans une phase semblable. Une phase qui permettrait au MDN de solidifier et d’élargir ses collaborations avec les mouvements sociaux, pour que tout le monde pointe du doigt les effets du système électoral sur leurs causes respectives. Mais surtout, pour réinventer ensemble les élections, avec nos propres outils.

Je remercie particulièrement les militantes et les militants des premières années du MDN. J’aurai aimé nommer tout le monde, mais j’ai donné un aperçu en fournissant quelques noms. Nous avons travaillé dur et bien, mais on l’a fait dans le plaisir, car il faut être nourri par sa militance.

Que le résultat ne soit pas encore atteint ne change pas le fait que nos actions continuent de porter fruit.

Les militantes et les militants actuels ont du travail en perspective. Non seulement pour tous les votes comptent, mais pour que toutes les personnes comptent.

Je nous souhaite de belles années militantes.

Mercédez Roberge
Présidente du MDN de 2003 à 2010